5 février 2008

Grêve générale des fonctionnaires palestiniens

La police opère une descente dans le centre de Ramallah,
DR Nadia Sweeny
Depuis mardi, le secteur public palestinien est en grève générale. Les fonctionnaires se soulèvent contre une décision gouvernementale, les forçant à payer leurs factures en retard depuis l’arrivée au pouvoir du Hamas.

Plus de 130 000 fonctionnaires palestiniens sont en grève générale mardi 5 et mercredi 6 février, ayant pour conséquence la fermeture de toutes les écoles publiques et le ralentissement du travail des ministères et des hôpitaux gouvernementaux.


Les fonctionnaires s’opposent  à une nouvelle loi gouvernementale qui les force à payer, avant le 25 janvier 2008, sous peine de sanctions, leurs factures d’électricité et d’eau, impayées depuis l’élection du Hamas au parlement. Le boycotte des aides internationales faisant suite à la victoire du parti islamique, avait eu pour conséquence le non paiement des honoraires des employés qui ont donc pris du retard sur le recouvrement de leurs factures.« Ils ne nous ont pas payé pendant un an et demi et ils nous forcent à payer les factures d’un coup, lance Bassam Zakarna, directeur de l’Union des employés du secteur public.  Nous ne sommes pas contre l’idée, mais contre la manière de faire ! ».

Si les fonctionnaires récalcitrants ne paient pas, ils verront un pourcentage de leur salaire automatiquement prélevé et le refus  des institutions de toute délivrance de papiers officiels. « Nous devons nous présenter avec un papier prouvant que nos factures sont à jour. Cela revient à une accusation générale et chacun doit aller prouver son innocence, s’exclame Bassam Zakarna. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement s’implique la dedans, les compagnies d’électricité et d’eau sont sensées être du secteur privé. » Les revendications des fonctionnaires sont multiples. Outre l’annulation de cette loi, ils demandent le paiement, d’ici la fin 2008, des salaires impayés durant la période de boycotte, l’ajustement de leurs salaires à l’augmentation de prix, ayant atteints 40%, le paiement des salaires pour les familles de « martyrs » et une aide pour les transports des fonctionnaires, parfois chers à cause des forces d’occupation israélienne.

La situation est tendue. Le ton est monté vivement entre les Unions de travailleurs et les membres du gouvernement, notamment le premier ministre Salam Fayyad et le ministre de l’information et des affaires étrangères, Ryiad Al Maliki. Ce dernier s’est insurgé contre une comparaison, faite par M. Zakarna, entre les actions gouvernementales et une décision du même type, prise en 1987 par le gouvernement israélien contre des citoyens palestiniens. Zakarna a décrit cette décision comme celle d’une « force d’occupation ». Riyad al Maliki a demandé l’ouverture d’une enquête sur ces allégations, qui selon lui, « indique un manque certain de patriotisme.» Le ministre a de plus affirmé que le gouvernement palestinien voulait « recouvrir une perte annuelle de 500 millions de dollars, due aux factures impayées » et lutter « contre la culture du non paiement. »

Le président de l’Union des professeurs, Jamil Shahada, a ouvertement répliqué que « celui qui parle de culture du non paiement est un inculte. » M. Shahada, leader incontesté du Fatah et ancien conseiller de Yasser Arafat, explique cette levée de bouclier gouvernementale par son appartenance et celle de M. Zakarna, au leadership du Fatah. « Les membres du gouvernements ne sont pas affiliés au Fatah et pensent que nous faisons ce type d’action pour renforcer le pouvoir de notre parti politique, mais c’est faux » indique-t-il. Un entretien officieux a eu lieu ce lundi soir entre les directeurs d’unions et les ministres impliqués.

Mais les garanties apportées par le gouvernement palestinien n’ont pas satisfait pleinement les directeurs d’unions qui ont décidé la poursuite de la grève. D'autres entretiens doivent avoir lieu, devant déboucher sur la décision d’une éventuelle prolongation du soulèvement à la semaine prochaine.

Nadia S.

1 février 2008

L'intifada des neiges

DR Nadia Sweeny

La Cisjordanie est sous la neige. Le gouvernement a décrété un état d'urgence suite aux prévisions météorologiques catastrophiques de cette semaine.

Les météorologues sont plus efficaces que les politologues, c'est déjà ça de gagné. La tempête politique israélienne annoncée et attendue suite à la publication du rapport Winograd sur la guerre au Liban n'a pas eu lieue, mais au même moment, le ciel se déchaînait dans la région. 
Trois jours de couvre feu forcé à Ramallah ont suffit pour rassurer les esprits : certaines prévisions tombent juste. La neige a donc envahit, comme prévue, toute la Cisjordanie. A Ramallah, des batailles rangées de boules de neige ont été organisées par les jeunes palestiniens en mal d'amusement. Entre les soldats en keffieh, arpentant les rues à la recherche de victimes potentielles et les snipers sur les toits, armés de boules glacées, chaque passant en a pris pour son compte. Les jeunes s'entraînent à la troisième Intifada, annoncée par de grands experts ici et là suite à l'ouverture de la frontière entre Gaza et l'Egypte à Rafah. Non, n'allons pas si loin, les jeunes se sont juste détendus et amusés, s'étant vue refuser l'entrée des écoles, universités et boulots, de part l'annonce d'un état d'urgence gouvernemental due à la tempête de neige qui a déferlé sur la région. Quoi qu'il en soit, la bonne humeur règne à Ramallah et les palestiniens goûtent aux plaisirs de la neige, de courte durée dans cette partie du monde. Les jeunes se sont déchaînés et peu importe ce que les gens en pensent, ils vous coursent dans les rues armés de boules blanches et près à vous transformer en bonhomme de neige, et même si vous n'êtes pas d'accord, personne ne viendra vous sortir de votre igloo, pas même les policiers palestiniens, armés de vrais flingues, hilares, qui semblent jouer les arbitres : c'est la règle de l'Intifada des neiges...


Nadia S.

28 janvier 2008

La Palestine en deuil, Abbas en danger

DR Nadia Sweeny
L'Autorité Palestinienne a décrété un deuil de trois jours suite à la mort, samedi soir à Amman, de George Habache, le fondateur du Front Populaire de Libération de la Palestine, parti gauchiste encore inscrit sur la liste internationale des organisations terroristes. Mais même dans le deuil, les dissensions demeurent.

Dimanche soir, le rituel traditionnel des condoléances s'est déroulé à la Moqataa de Ramallah, où chacun pouvait entrer et serrer la main des leaders des partis membres de l'OLP. Cette sélection exclue évidemment, le Hamas et le Djihad Islamique. Pourtant, ce dernier, depuis Gaza, a exprimé sa tristesse devant la mort d'un leader incontesté et emblématique de la cause palestinienne.

Les palestiniens, venus nombreux, ont donc eu l'occasion de rencontrer pour quelques secondes et sous surveillance rapprochée, leur président et son équipe. L'ambiance était au recueillement devant la mort de Habache, né dans la Palestine sous mandat britannique, et devenu réfugié après la création, en 48, de l'état d'Israël. Cependant, chacun sait ici, que le FPLP et le Fatah sont en désaccord sur beaucoup de points et notamment sur la poursuite de la lutte armée contre Israël. Mahmoud Abbas a été vivement critiqué par le comité central du FPLP pour ses déclarations sur les "roquettes futiles" envoyées de Gaza sur le territoire israélien. Le dernier communiqué du parti populaire parle même de continuer activement la résistance, notamment par le biais de leur milice armée : les brigades Abu Ali Mustafa, du nom du prédécesseur de Habache à la tête du FPLP, assassiné en 2001 par l'armée israélienne.

Mouvement terroriste
Pour l'occasion, Abderahim Malouh, actuel leader du parti populaire, se retrouve aux côtés du président Abbas sous la photo du défunt, à la Moqataa. Le FPLP à tendance marxiste-léniniste, est considéré par la communauté internationale comme un mouvement terroriste depuis le détournement d'un avion de la compagne El Al, le 23 juillet 68. Il est détesté par nombre de pays arabes, dont en première ligne la Jordanie. En effet, Habache a été obligé de fuir la Jordanie pour la Syrie en 1957, étant vivement recherché pour son activisme politique et son opposition au système monarchique jordanien. Le FPLP a de plus, grandement payé le prix de son activisme, notamment lors du "septembre noir", en 1970, où la répression jordanienne sur les palestiniens a atteins son paroxysme. Or, coup du sort, c'est précisément dans ce pays que le leader incontesté de la révolte palestinienne a rendue l'âme.

Le président Abbas doit, ce lundi, participer aux funérailles à Amman avant de se rentre en Egypte pour tenter de régler le casse tête de Rafah, que le Hamas a judicieusement ouvert au moment opportun, tirant largement la couverture de sympathie populaire à son avantage, faisant ainsi un pied de nez remarquable au gouvernement israélien et à l'Autorité Palestinienne. Abbas demandait depuis un bon moment l'obtention du contrôle de Rafah... mais Israël refusait et imposait une pression constante. Hamas a réglé momentanément le problème. 

Les palestiniens en rêvaient, le Hamas l'a fait
Le Hamas répond précisément et de manière judicieuse aux exigences d'une population affamée par un blocus stricte.Il se rachète une conduite depuis la prise de pouvoir violente de la bande de Gaza en juin 2007 et propose à Abbas de négocier la gestion de Rafah. Main tendue vers le Fatah, sur laquelle ce dernier crache officiellement. Cependant, selon le bureau du président, Mahmoud Abbas doit se rendre en Syrie après son passage au Caire.

Va-t-il rencontrer le chef du Hamas, Khaled Meshaal pour ouvrir un dialogue officieux ? Abbas est en danger politiquement : sa côte de popularité est en baisse constante. Il a perdu Gaza, se rapproche dangereusement d'Israël et des US, en dénigrant le combat armé contre l'occupant et refuse, en accord avec Israël, tout dialogue pour régler les scissions inter-palestiniennes. Un ensemble de qualificatifs qui n'inspire pas confiance à la rue palestinienne.


Nadia S.

24 janvier 2008

Marée humaine venue de Gaza

Mercredi 23 janvier, au matin, la frontière entre l’Egypte et la bande de Gaza a été ouverte à coup d’explosifs. Une marrée humaine palestinienne s’est ruée dans les villes égyptiennes pour se ravitailler suite à la crise humanitaire déclenchée par le blocus israélien. 

Mercredi dans la matinée, des hommes en armes ont posé des explosifs le long de la frontière entre l’Egypte et la bande de Gaza, créant une vingtaine d’ouvertures sur un kilomètre de la barrière métallique de séparation. Une marrée humaine venant des territoires palestiniens s’est alors ruée sur les villes égyptiennes alentours afin de faire des provisions en nourritures, habits et diverses marchandises qui ont atteints un prix exorbitant dans la bande de Gaza, suite au blocus israélien.

Les Nations Unies évaluaient mercredi à 350 000 personnes, la masse humaine qui se déplace d’un territoire à l’autre. Le gouvernement israélien pour sa part, parle de moins de 100 000 palestiniens. Les gardes frontières égyptiens n’ont pas tenté, après l’émeute de mardi, de s’interposer face aux habitants palestiniens. Le président Mubarak a ordonné à ses troupes de ne pas empêcher les palestiniens d’entrer et de se ravitailler sur le territoire égyptien, tout en prenant ses dispositions mercredi pour éviter aux palestiniens de s’enfoncer plus dans le territoire égyptien et notamment de rejoindre le Caire : le pont d’As-salam, traversant le canal de Suez, a été fermé.

L’ambassadeur d’Egypte à Ramallah s’est refusé à tous commentaires sur la crise de Rafah en elle-même, cependant, dans une interview exclusive, il a assuré « que les 750 soldats égyptiens placés à la frontières ne sont pas assez nombreux. Ils se relaient toutes les huit heures, par trois changements de 250 soldats. L’Egypte demande a Israël d’ajuster ce nombre aux besoins sécuritaires de la frontière, » mais Israël refuse en permanence. « Que pouvons nous faire ?, demande M. Akl. Nous considérons le Hamas comme partie intégrante de la Palestine et nous sommes attachés aux négociations avec eux. » affirme-t-il.

Rafah : point de discorde
C’est la seconde fois que le point de passage de Rafah est ouvert aux palestiniens de Gaza, sans l’agrément d’Israël. La première concernait les 2 500 pèlerins palestiniens qui ont refusé de passer par Israël pour se rendre en Egypte puis en Arabie Saoudite pour le pèlerinage à la Mecque. Cette ouverture momentanée avait déjà crée un tollé dans les relations israélo-égyptiennes. Tzipi Livni, ministre des affaires étrangères israélienne, assurait alors que la gestion de la frontière entre Gaza et l’Egypte était une catastrophe, accusant le Hamas de se ravitailler, par ce biais, en armes et liquidités servant à la lutte contre Israël.

Ce jeudi, nombre d’officiels israéliens se sont empressés de déclarer qu’à partir de mercredi, l’Egypte devait prendre la responsabilité de la bande de Gaza, pour lui fournir aide humanitaire, électricité et nourriture. « Nous devons comprendre que lorsque que Gaza est ouvert sur un autre bord, nous perdons sa responsabilité. Nous voulons donc nous en défaire, » A ainsi déclaré Matan Vilnai, député ministre de la défense. Certaines sources affirment que le Hamas avait prévu ce coup depuis plusieurs mois, tout en avisant les autorités égyptiennes à l’avance. Le parti islamique attendait simplement le bon moment pour ouvrir la frontière et ainsi casser le blocus israélien sur les habitants palestiniens. Le Hamas gagne en légitimité, notamment après l’appel de Khaled Meshaal, leader du groupe islamique en exil à Damas, et d’Ismaël Haniyeh, pour offrir le contrôle de Rafah à l’Autorité Palestinienne de Ramallah et à l’Egypte. « Nous au Hamas et nos frères du gouvernement palestinien dirigé par Ismaël Haniyeh déclarons que nous sommes près à négocier avec nos frères à Ramallah et en Egypte, sur comment administrer le point de passage », a ainsi déclaré M. Meshaal. Des négociations se sont ouvertes d’urgence entre le Hamas et l’Egypte, le gouvernement palestinien de Ramallah se refusant à tout dialogue avec le groupe islamique au pouvoir à Gaza. Le ministre des affaires étrangères égyptien a déclaré jeudi que la frontière avec Gaza resterait ouverte tant qu’il y aura une crise humanitaire dans la bande côtière.


Nadia S.

16 janvier 2008

Gaza : 19 morts remettent en cause le processus de paix

19 morts et une cinquantaine de blessés : c’est le constat final de l’attaque israélienne massive sur la ville de Gaza ce mardi 15 janvier. Toutes les voix des factions palestiniennes se sont jointes pour dénoncer ce « massacre », qui donne un sérieux coup aux négociations de paix.


Mahmoud Abbas et son équipe, ont exprimé leur colère face au « massacre » perpétré dans la bande de Gaza par l’armée israélienne ce mardi. Le bilan de l’invasion militaire effectuée par les tanks et hélicoptères israéliens sur Sejaiyeh et Zaitoun, dans la banlieue de la ville de Gaza, est lourd : 19 morts, dont cinq civils et une cinquantaine de blessés. Depuis le premier janvier 2008, 55 palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza, suite à des incursions militaires israéliennes. L’Autorité Palestinienne a menacé de stopper les négociations de paix. Ahmad Qorei, chef palestinien des négociateurs, a déclaré que « ce massacre place des obstacles et crée des difficultés pour les négociateurs. » Cependant, Riyad Al Maliki, ministre palestinien des affaires étrangères et de l’information, a affirmé que les « négociations ne sont pas connectées à ce qui se passe tous les jours. » Lors de sa conférence de presse, mardi, le ministre a tout de même accusé les israéliens de « crimes, devenus une routine à Gaza. C’est contre les droits de l’Homme et nous travaillons pour stopper ces attaques. Nous ne voulons pas rester là, à regarder, s'est-il exclamé. Nous avons contacter le Quartet pour faire pression sur les israéliens et nous demandons l’intervention d’une force internationale pour protéger le peuple palestinien. » Cette demande avait déjà été formulée mainte fois par le gouvernement de Ramallah, cependant, toutes les autres factions palestiniennes considèrent qu’une force internationale serait une seconde occupation.

Lors de l’attaque israélienne de mardi, le fils de Mahmoud Zahar, leader incontesté du Hamas, a été tué. Le groupe islamique a décrété un deuil national de trois jours. Le gouvernement d’Abbas a adressé ses condoléances à la famille Zahar et a appelé la population de Cisjordanie à ne pas ouvrir boutique ce mercredi, en commémoration pour les habitants de la bande côtière. Mais Mahmoud Zahar a attaqué de front la politique de Mahmoud Abbas : « C’est la volonté d’Abu Mazen et de ses collègues, les collaborateurs avec Israël et les espions de l’Amérique, affirme-t-il avant d’ajouter que cette attaque est l’un des résultats de la visite de Bush, qui encourage les israéliens à tuer notre peuple. » Ismaël Haniyeh, premier ministre de facto du gouvernement Hamas à Gaza, a dénoncé l’attaque israélienne et a fait un don de sang pour les blessés.

Du côté israélien, on s’inquiète. Le Hamas, qui depuis sa prise de pouvoir ne s’était pas impliqué directement dans l’envoi de roquettes vers Israël pourrait changer ses positions. Suite à cette invasion, le nombre de roquettes envoyées sur le territoire israélien s’est décuplé. Une quarantaine d'entres elles ont touchées le désert du Néguev et la ville de Sderot mardi, faisant plusieurs blessés. Les brigades Ezzedine al Qassam, affilié au Hamas, ont clamé leur responsabilité pour l’assassinat, par un snipper, d’un israélien dans le kibboutz de Ein Hashlosha, non loin de la frontière sud de la bande de Gaza. Elles déclarent, de plus, avoir tirer plus de 45 roquettes ce mardi et l’envoi de 60 Qassams ce mercredi, 75 mortiers et trois missiles RPG. Ce chiffre s’ajoute aux 2 projectiles envoyés ce mercredi, par les brigades des martyrs d’al Aqsa, affiliés au Fatah, ainsi qu’aux sept des brigades al Quds du Jihad Islamique. Toutes les factions semblent se rassembler pour multiplier les attaques contre Israël. 

La menace d’une invasion israélienne de grande envergure plane. Des sources au sein des établissements de défense israéliens on déclaré que « le temps n’était pas venu pour conduire une opération de grande envergure sur le terrain, mais cela pourrait être le cas si l’augmentation des tirs de roquettes continue. » Selon le quotidien israélien, Haaretz. Cette escalade de violence met en péril les négociations de paix, déjà impopulaire auprès des palestiniens.


Nadia S.

15 janvier 2008

Israéliens et palestiniens entrent dans une période charnière du processus de paix.

Ahmad Qorei et Tzipi Livni ont débuté, lundi, les négociations sur les sujets phares du conflit israélo palestinien. Au même moment, le conseil central de l’OLP se réunit pour décider de la dissolution du parlement palestinien, alors qu’en Israël, Ehud Olmert rencontre Advigdor Lieberman pour négocier le maintient du gouvernement de coalition.

Depuis Dimanche, les évènements politiques des deux parties : israélienne et palestinienne, sont particulièrement importants dans le déroulement du processus de paix, initié à Annapolis en novembre 2007. D’une part, le président palestinien Mahmoud Abbas a annoncé le début des négociations sur « les sujets phares » du conflit israélo-palestinien, à savoir le statut de Jérusalem, la question des réfugiés palestiniens et du droit au retour, les frontières définitives, les problèmes sécuritaires et la question des ressources d’eau. Se sont les deux chefs des équipes négociantes qui sont en charge de ces discussions difficiles : Ahmad Qorei pour la partie palestinienne, et Tzippi Livni, ministre des affaires étrangères, pour la partie israélienne. « Si nous parvenons à un accord sur ces sujets, alors nous pourrons dire que nous avons un accord de paix. » a annoncé Mahmoud Abbas.

Stabilité politique
En parallèle, palestiniens et israéliens tentent d’assurer leur stabilité politique réciproque. Dans les territoires occupés, le conseil central de l’OLP est entré en réunion depuis dimanche, afin de discuter de l’éventuelle dissolution du parlement palestinien (PLC), tenu par le Hamas depuis les élections de 2006. Cette annonce, qualifiée de scandaleuse et d’illégale par les parlementaires liés au groupe islamique, précipiterait des élections législatives anticipées, proposées par le président Abbas depuis plusieurs mois, afin de mettre un terme au blocage institutionnelle que le parlement connaît depuis deux ans. Ahmad Bahar, parlementaire lié au Hamas, s’est indigné de cette possibilité, expliquant que « selon l’article 113 de la constitution palestinienne, personne n’a le droit de dissoudre le parlement. » Il accuse les parlementaires Fatah d’avoir boycotter les cessions parlementaires, et ainsi rendre le PLC inactif. « Le parlement a des réunions régulières, mais le problème c’est que les membres du Fatah ont boycotté les cessions. Ceci, s’ajoutant au fait qu’Israël a arrêté beaucoup de parlementaires Fatah, dont le Speaker, Abdel Aziz Dweik, » Insiste M. Bahar. La grande inconnue de ces éventuelles nouvelles élections législatives, est la bande de Gaza, qui risque de ne pas être impliquée dans le nouveau vote. Une réalité qui diviserait d’autant plus les deux territoires et qui rendrait difficile un processus de paix général.

Maintient
Du côté israélien, le premier ministre Ehud Olmert tente de maintenir son gouvernement en place. Olmert rencontre donc ce mardi, Avigdor Lieberman, secrétaire général du parti d’extrême droite israélienne : « Yisrael Beiteinu », membre du gouvernement de coalition. Avigdor Liebermann a, plusieurs fois, menacé le premier ministre de quitter le gouvernement de coalition si les négociations avec l’Autorité Palestinienne aboutissaient. Il a réitéré ses menaces, lors de l’annonce par Olmert de sa volonté d’évacuer les colonies sauvages ou Outposts, présents dans les territoires palestiniens. Cependant, nombre de sources indiquent que même si Liebermann quittait le gouvernement, Olmert tenterai de rallier un autre parti à la coalition : Unité Torah Judaïsme.

Israéliens et palestiniens, au début des négociations sérieuses sur les sujets phares du conflit, tentent de maintenir et d’asseoir leur pouvoir politique interne afin de stabiliser la situation. Des efforts remarquables, qui s’ils aboutissent, pourraient construire une base plus solide à un éventuel accord de paix. Cependant, l’épine dans le pied du processus de paix, resterai la question de la bande de Gaza, sous contrôle exclusif du Hamas depuis juin 2007.


Nadia S.

11 janvier 2008

La paix ? Un rêve...

Bethléem, pour la commémoration des fêtes de Noël.
DR Nadia Sweeny
La paix est un rêve auquel les palestiniens ne semblent plus croire aujourd’hui et la visite du président américain ne change en rien cet état de fait. Le pessimisme est au rendez vous et, à Ramallah, chacun continu sa petite vie sans s’investir plus que d’habitude dans le débat politique engagé.


« La visite de Bush ne changera rien dans ma vie, déclare Ahmad, manutentionnaire de 27 ans, vivant à Ramallah. Tous les présidents américains, à la fin de leur mandat, veulent la paix et à chaque fois on n’obtient rien. La politique américaine a toujours soutenu les israéliens, jamais les arabes, et il n’y a pas de raisons que ça change. » Insiste le jeune homme, portant ses cartons. « Aujourd’hui, nous avons juste deux choix : la politique américaine ou iranienne. Moi, je ne veux ni l’un ni l’autre. La politique est sale et pour moi, la paix est un rêve inaccessible. La solution viendra du ciel. » Conclu-t-il. Ashraf, son collègue du même âge, n’attends pas plus de la démarche du président des Etats-Unis : « Il n’y aura pas de paix si les israéliens restent dans les terres de 67 car nous n’aurons pas de possibilités d’établir notre état. explique-t-il. Dans un premier temps, les américains et les israéliens devraient s’accorder pour stopper les attaques contre les palestiniens. Depuis Oslo en 1993 la situation est la même, rien n’a changé. » Se désole-t-il.

Le président Bush est dans la ligne de mire de l’opinion publique palestinienne et chacun se demande pourquoi, en fin de mandat, il s’investit dans un processus de paix. « Cela fait 7 ans qu’il est président des Etats-Unis et il se réveil que maintenant ? » se demande Nesreen 25 ans, pharmacienne. « Il ne fera rien. Nous vivons dans la misère depuis plusieurs années et nous continuerons à vivre dans la misère. Ils n’ont jamais rien fait pour nous, ni les israéliens, ni les américains, ni même Mahmoud Abbas. Je ne leur fais pas confiance. » Conclut-elle. Reem, 32 ans, est d’un avis plus drastique. « Même dans la bible il est écrit « la terre sainte est une terre de paix qui ne verra jamais la paix. » et c’est vrai. S’exclame-t-elle. Nous sommes nés dans cette saleté et nous n’en sortirons pas. Nous étions mieux lorsque nous étions à 100% sous occupation israélienne, car nous avions certes les mauvais cotés de l’occupation, mais nous bénéficions aussi des bons comme le droit de se déplacer librement, la haute technologie, l’éducation etc. Aujourd’hui, nous n’avons que la violence et l’oppression. » Explique Reem. « Je me sens désolée pour Mahmoud Abbas, car il doit gérer Israël d’un côté, le monde de l’autre, les palestiniens avec le Hamas etc., mais nous ne savons pas diriger un état, nous sommes des gens négatifs car nous avons appris à être négatifs. Il n’y a pas de solutions. » Conclu-t-elle.

Les efforts américains ne trompent pas les palestiniens : « Je n’attends pas grand-chose de la visite de Bush car je pense que c’est une campagne de relation publique. » Déclare Tayseer, 47 ans, artiste peintre originaire du camp de réfugiés de Jabaliya, dans la bande de Gaza. « J’espère, mais je ne pense pas que nous obtiendrons quelque chose de sérieux de cette visite. J’apprécie qu’ils commencent à parler du cas israélo-palestinien et qu’ils prennent du temps et des efforts pour essayer de le résoudre. » Admet-il. « Je pense que nous devons négocier. C’est le seul moyen, car la violence ne donne rien, ni à l’un ni à l’autre. Nous devons vivre sur la même terre et être ami. Ce n’est pas facile pour nous, palestiniens, d’oublier 78% de la Palestine, mais c’est la vie. » Explique calmement Tayseer. Sa vision de la politique américaine a quelque chose de désuet : « Parfois, je trouve la politique américaine stupide : ils gèrent l’Irak et le conflit israélo-palestinien, comme un jeu. Ce n’est pas solide. » Convaincu que le président Abbas tente du mieux qu’il peut d’établir la paix, Tayseer révèle son angoisse : « Ils disent toujours que les palestiniens refusent tout. Abbas dit non, je ne refuse rien, discutons. Donc, il aide. Mais si il n’y a pas de résultats, si après les négociations, rien ne se passe, la violence deviendra la seule solution. » S’inquiète-t-il. « Si Abbas échoue, se sera un message claire pour les gens ici et la violence sera la seule voie. J’espère que les américains et les israéliens comprennent ça. » Conclu l’artiste. Georges W. Bush n’a donc pour le moment, pas convaincu la rue palestinienne qui reste persuadée que la paix est un lointain mirage.


Nadia S.

10 janvier 2008

Bush en visite

George W. Bush a été accueilli en grande pompe ce jeudi matin à Ramallah par le président Mahmoud Abbas. Malgré la confirmation par Ehud Olmert des constructions coloniales à l’Est de Jérusalem, Bush promet un état palestinien, comme première étape de la paix.

Pour des raisons météorologiques, le président américain s’est rendu en Cisjordanie par la route. Les villes de Ramallah et de Bethléem ont été complètement bouclées et la sécurité palestinienne a semble-t-il prévenu les habitants des deux villes de ne pas rester devant leur fenêtre, ou même en haut des colline de la ville, par peur des tirs de snipers américains, déployés dans toute la zone.

Malgré l’appréciation, par le président américain, du caractère exclusivement juif de l’état d’Israël auquel les palestiniens sont opposés, Georges W. Bush et Mahmoud Abbas sont apparus décontractés lors de leur conférence de presse ce jeudi matin à la Moqataa de Ramallah. Le président Abbas a réitéré la demande des palestiniens de voir stopper « la souffrances des gens et de leur familles, de pouvoir se déplacer librement, sans check points ou routes séparées, sans colonies qui se développent sur leur terre. » Mahmoud Abbas a été « appelé à continuer son travail pour renforcer les règles de la loi », et d’appliquer des « réformes politiques, économiques et financière avec transparence pour construire un état moderne et démocratique. »

Les officiels parlent...

S’adressant au président Bush, Abbas a déclare qu': « avec nos voisins israéliens, sous vos offices, nous allons, par la voie des négociations naturelles, discuter les statuts finaux, que nous espérons terminer avant la fin de votre terme, mettant ainsi fin à l’occupation qui a commencée en 1967 et établir notre état palestinien avec Jérusalem Est comme capitale. » Le président palestinien, a voulu rendre hommage à l’implication américaine et au sérieux de la visite présidentielle de Georges Bush. « Soyez sur M. Le président, que la paix dans le monde commence ici, sur la terre sainte. » déclare ainsi, le président palestinien.George W. Bush, pour sa part, s’est dit confiant dans le processus de paix, affirmant que l’état palestinien verra le jour et qu’un traité sera signé : « Israéliens et palestiniens doivent se rencontrer et faire des choix importants. Je crois que c’est possible et que ça va arriver. Il y aura un traité de paix signé. (…) Je suis sûre qu’un état palestinien va émerger, constituant la première étape de la paix. » 

Réitérant son programme en trois phases : négociations, règlements de problèmes de la Feuille de Route et aide à l’Autorité palestinienne dans le fondement d’une économie stable et des forces de sécurité efficaces, Bush affirme que « Le fait que les actions israéliennes ruinent les efforts des forces de sécurité palestiniennes et l’autorité du gouvernement palestinien, est quelque chose avec lequel nous ne sommes pas d’accords et nous avons été claire sur cette position. »

... et la colonisation continue

Cependant, questionné à propos de la colonisation, le président Bush n’a pas pu affirmer qu’Israël gèlerait ses colonies en Cisjordanie. Ehud Olmert a réitéré, suite à sa rencontre avec le président américain mercredi, que les colonies construites à l’Est de Jérusalem ne seraient pas gelées, bénéficiant d’un statut particulier. « Nous avons été claire, le statut de Jérusalem est différent des autres colonies » a martelé le premier ministre israélien. Face à ce refus, Georges Bush s’est rabattu sur la situation des outposts, ou colonies sauvages, déclarant qu' « Ils doivent être évacués ».

Le président américain s’est dit ne pas vouloir « imposer » un accord, mais simplement aider : « Les deux partis doivent arriver à un accord par eux même. » Bush et Abbas ont ensemble abordé le sujet de la lutte contre l’extrémisme : « Notre monde est dangereux, a déclaré le président américain. Il y a des gens qui tuent d’innocentes personnes pour achever un but politique. (…) C’est ce contre quoi nous luttons en Irak, en Afghanistan et au Liban. » Insiste George Bush, remerciant Abbas de sa compréhension sur ce sujet. « Ce n’est qu’en luttant contre la terreur que nous redéfinirons le futur des deux états. » Bush a de plus affirmé que lorsque les forces de sécurité palestiniennes seront efficaces, notamment sur ce sujet, les « check point ne seront plus utiles. » Il appel les autorités israéliennes a aider les forces de polices palestiniennes, car « ils doivent comprendre que c’est dans leur intérêt ».

Rappelant les obligations réciproques imposées par la Feuille de Route, le président américain semble débordant de confiance sur la collaboration israélo-palestinienne, malgré nombre de sujets épineux qui ternissent l’horizon d’accords sur les statuts finaux. Bush s'en est allé pour Bethléeem, sans même se recueillir sur la tombe d'Arafat. Au sein du gouvernement palestinien, « c'est un sujet qu'on n'a pas abordé » selon le bureau de presse de la Moqataa.

Nadia S. 

8 janvier 2008

Tentative de colonisation sauvage à Bil’in

Mohammad Khatib a été violemment attaqué par les colons 
pour avoir tenté d'empêcher l'extension de la colonie.  
Les colons ont tenté la semaine dernière, d’implanter un nouvel out post dans le village de Bil’in non loin de Ramallah, au centre de la Cisjordanie. Les habitants palestiniens tentant de s’interposer, ont été violemment attaqué par les colons sous les yeux passifs des soldats israéliens. Peu avant l’arrivée du président Bush, la question du développement de ces outposts, illégaux selon la loi israélienne, pose problème.

Mercredi vers 19h30, le village de Bil’in s’affole : les colons, de l’autre côté de la barrière électrique, installent de nouvelles caravanes sur les terres des villageois. « Se sont des amis qui nous ont appelé pour nous prévenir, explique Mohammad Khatib, membre du comité populaire des villageois. Nous avons tout de suite décidé d’aller sur les lieux pour prendre des photos. Les colons n’avaient pas fini, ils étaient en train d’installer les caravanes avec un camion leveur, continue l'homme. Nous avons donc décidé de nous mettre en dessous pour les empêcher de terminer. Ils se sont énervés et ont commencé à nous taper et nous envoyer des cailloux. Ils étaient une quinzaine. Nous n’étions que trois, Abdallah, moi et le cameraman car les autres ont été bloqués à la barrière par les soldats. Le cameraman a fini par s’échapper et les colons nous ont tapé. Ils ont finalement réussi à installer leur out post. Les soldats étaient là et ils n’ont rien fait ! » raconte Mohammad, le visage boursouflé d’ecchymoses. Les deux palestiniens ont été tabassé sous les yeux passifs des soldats hébreux. « C’est un dysfonctionnement de la part des soldats, qui considèrent que seule la police israélienne détient le pouvoir d’arrêter des citoyens israéliens,  renchérit Mickaël Sfard, avocat israélien en charge du dossier de Bil’in. C’est une forme d’aide passive. » Cependant, la police israélienne a été appelée par des ONG israéliennes, elles-mêmes contactées par les villageois. «  Ils sont arrivés au bout d’une heure et ont appelé une ambulance, mais ils ont laissé le camion s’en aller et ils n’ont pas arrêté les colons, s'insurge Mohammad Khatib. L’ambulance israélienne nous a conduit au checkpoint de Malin où nous avons attendu une demi heure l’ambulance palestinienne pour nous emmener à l’hôpital de Ramallah. »


Des soldats protègent la barrière de séparation,
confisquant 50% des terres du village de Bil'in.
Les deux hommes ont porté plainte au centre de police de la colonie la plus proche, notamment à l’encontre des policiers israéliens qui n’ont effectué aucune arrestation lors de leur intervention. « Nous avons porté le dossier devant l’Autorité de poursuites des soldats, accusant la police israélienne de négligence active dans ce dossier. Les colonies sauvages sont illégales selon la loi israélienne ,» affirme Mickaël Sfard.

Le village de Bil’in a tout de même été chanceux, car suite aux pressions des ONG, les caravanes installées là pour des raisons stratégiques, ont été retirées. « Si ces caravanes venaient à devenir une colonie, la Haute Cours de justice israélienne devrait revoir sa décision de changer le tracé du mur,» explique l'avocat israélien.

En effet, il y a quelques mois, la Haute Cours a décidé de changer le tracé de cette barrière, considéré illégal car n’étant pas basé sur des contraintes sécuritaires. Suite a cette expérience, les villageois restent sceptiques quant aux négociations : « les israéliens prétendent négocier, mais en fait ils continuent d’étendre leurs colonies et la venue de Bush n’y changera rien, lance Mohammad. il y aura peut être des évacuations d’un ou deux outposts, mais rien d’impressionnant. C’est juste un jeu médiatique. » Assure-t-il. Malgré leur illégalité au regard de la loi israélienne, plus de 90 colonies sauvages de ce type existent en Cisjordanie, sous les yeux passifs du gouvernement israélien. Un sujet chaud parmi tant d’autres, sur lequel le président américain devra se pencher, lors de sa première visite dans la région depuis le début de son mandat.


Nadia S.